Depuis 7 ans, le problème est grave et pendant, et depuis 7 ans, « on » a laissé perduré le provisoire jusqu’au blocage de ces dernières semaines provoqué par un véritable gâchis. Rappel.
DES CENDRES DESTINÉES À HOLCIM
Tout commence avec la construction par Enercal de la centrale Prony Energie à Prony, destinée à la fois à l’usine Vale et aux besoins domestiques des consommateurs calédoniens. La centrale est à charbon. Et les cendres ? Elles seront recyclées dans la fabrication du ciment par Holcim. Tout est au point, c’est juré.
Sauf que quand l’usine est mise en marche et que les premières cendres sont proposées à l’industriel, rien ne va plus : leur qualité est insuffisante !
Manque de prévision ? Manque de précautions ? Toujours est-il qu’il faut immédiatement se débarrasser de ces cendres inutiles er encombrantes. La solution : les déverser à l’ISD de Gadji.
UNE SOLUTION PROVISOIRE QUI DURE
Cette installation, qui a succédé à l’antique dépotoir de Ducos, a coûté 10 milliards. Elle est aux normes européennes et appartient aux quatre communes de l’agglomération pour le stockage des déchets ménagers. Elle n’est pas prévue pour accueillir des déchets industriels. Mais bon, puisque c’est provisoire !
Un an plus tard, pas de nouvelles d’une solution adaptée à ce problème. Les cendres sont déposées sans traitement particulier, volettent alentour, jusqu’à la tribu de N’Dé et dans toute la mangrove. Le Maire de Paita s’inquiète et interroge les responsables. Rien n’y fait.
En désespoir de cause, il prend un arrêté interdisant le stockage des cendres à Gadji en janvier 2010. Branle-bas de combat dans les toutes les sphères : au bout de 3 jours, montre en main, « l’usine devra fermer ses portes » annonce-t-on à Harold Martin qui revient sur son arrêté.
Mais avec des engagements. Notamment celui de procéder tous les 3 mois à un point de situation et d’engager sans délai l’étude et la mise en œuvre d’une aire de stockage aux normes dans la région de la centrale.
Mais rien n’y fait. Enercal continue à produire des cendres, les services de l’environnement de la Province sud, compétente en matière de déchets industriels et d’installations classées, vaquent à d’autres occupations. 5 ans après, 60.000 tonnes de résidus de la centrale de Prony continuent à se déverser annuellement à Gadji.
PERSONNE NE S’ÉMEUT DU PROBLÈME
60.000 tonnes par an, c’est tout simplement énorme. Pensez : la production de déchets ménagers de l’agglomération est de 90.000 tonnes par an. De surcroît, le transport coûte une fortune : près d’un milliard par an ! Enercal paie mais ne s’émeut guère du problème …
Finalement, de relances de la mairie en silences d’Enercal et de la province, on aboutit à la grogne des coutumiers de Paîta qui ont le sentiment que tout le monde se moque et d’eux, et de leurs problèmes.
Le summum est atteint en avril dernier lorsque le Maire de Païta sollicite Enercal pour une réunion d’information et d’explication avec les coutumiers, et, aux dires de l’intéressé, « se fait envoyer sur les roses ».
Après, c’en est trop pour les coutumiers qui ne voient qu’un moyen de se faire prendre en considération : le blocage.
Réunions qui traînent, sollicitations sans réponse, on arrive péniblement à mettre les parties autour d’une table.
QUI PRENDRA L’INITIATIVE D’ALLUMER UN BRÛLOT ?
Vient s’ajouter à présent une autre question posées par les gens de Païta et exprimée crûment : « Ils nous envoient leur merde, et empochent l’argent ! ». Référence au juteux marché de transport.
Cette affaire met en lumière quelques disfonctionnements étonnants. D’abord, les cendres : étaient-elles recyclables ou non ? Le résultat constaté frise l’amateurisme. Ensuite, la zone de stockage du sud : un je m’enfoutisme général, à l’exception, cela se comprend, du maire de Païta-alors Président gouvernement qui avait tenté de faire adopter un bail de 13ha à Prony pour installer cette zone.
Aujourd’hui, tout le monde semble motivé …
Il faudra de toute façon, aboutir à une « solution consensuelle ». Certains espèrent en effet qu’en cas de poursuite de blocage, les forces de l’ordre interviennent. Funeste réflexion ! « Les coutumiers de Paita ne sont ni des voyous, ni de délinquants », aime à rappeler leur maire. Mais l’histoire ancienne autant que récente de la Calédonie est pleine d’enseignements.
Facile d’imaginer le passage interdit à N’Dé, les caillassages sur la RT1, quelques maisons brûlées, et par malheur, coups de feu et victimes : qui prendra l’initiative, pour des cendres, d’allumer le brûlot ?