Le gel du corps électoral a eu des effets d’une perversité insoupçonnée. Des milliers d’électeurs ont été exclus du droit de suffrage aux élections provinciales, et l’on pouvait imaginer que seuls seraient touchés des nouveaux arrivants.
C’était compter sans l’imprévoyance qui menace toujours de toucher des mesures extrêmes adoptées dans la précipitation, et sans vision prospective affinée.
Pour mémoire, tout de même, il n’est pas inutile de rappeler sans cesse que le corps électoral adoptés par les électeurs calédoniens consultés sur l’Accord de Nouméa était un corps glissant de 10 ans. Après d’âpres discussions, les “partenaires” d’alors étaient convenus de considérer qu’au bout de 10 ans de résidence ininterrompue, un habitant installé avait choisi de fixer ses intérêts matériels et moraux en Nouvelle-Calédonie. En clair, qu’au bout de 10 ans, il avait choisi de devenir Calédonien.
Le coup de force de 2007, bénéficiant de l’onction du président de la République, avait brutalement cassé ce principe accepté par tous, l’État y compris, pour y substituer la suppression de liberté de suffrage pour une catégorie de la population. Non seulement, cette mesure était sans précédent, mais comme dans tout coup de force, toute la portée n’en avait pas été mesurée.
Or il s’avère, 16 ans plus tard, que ce ne sont pas les seuls nouveaux arrivants qui ont été sanctionnés. Les chiffres mis en avant ces derniers jours font état de 11.000 natifs. C’est à dire, pour être précis, 11.000 jeunes Calédoniens nés en Nouvelle-Calédonie est privés du droit de vote pour les provinciales, des élections essentielles pour leur vie quotidienne.
Parmi ces 11.000 natifs, nombreux sont les jeunes Kanak, une situation ubuesque vue du côté des défenseurs de l’identité kanak et de son antériorité. “Absurde” est, pour eux aussi, un mot faible pour qualifier ce non-sens démocratique.
L’ouverture du corps électoral permettra de mettre fin à ces errements. Comment pourrait-il en être autrement ?
