A chaque visite du ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, incontestablement, les choses avancent. Voilà un responsable politique qui ne parle pas pour ne rien dire, qui fait ce qu’il a dit qu’il ferait, et qui se montre plus habile que ne le laisserait son attitude réservée.
D’abord, il réunit les indépendantistes en trilatérales. Bien sûr, devant cette évidence, ils expliquent qu’une trilatérale, ce n’est pas une réunion à trois. Darmanin ne veut pas les contredire, suggérant simplement que ça y ressemble …
Ensuite il enfonce le clou pour ce qui concerne la réforme électorale. Pas question de convoquer les électeurs des prochaines élections provinciales avec un corps électoral gelé, Constitution et respect de la Charte des Droits de l’Homme obligent. Il y aura donc une réforme. L’État propose 7ans ans glissants de présence pour être électeur. Aux “partenaires” locaux de dire s’ils sont d’accord ou pas, et, le cas échéant, de formuler d’autres propositions. Finalement, hier soir, coup de théâtre : les indépendantistes proposent 10 ans glissants, acceptant tacitement le principe du “dégel”.
Enfin, il met sur la table des discussions deux sujets sur lesquels le consensus est souhaité par l’État. On comprend que, pour eux, le calendrier est plus souple. Il faudra probablement un temps plus long pour trouver des convergences.
L’émancipation, d’abord, au travers d’un statut rénové “sans tabou”, et comprenant éventuellement des transferts partiels de compétence régalienne. Ce transfert n’est pas nouveau. Depuis 1998, la Nouvelle-Calédonie nomme des “délégués” auprès des ambassades d’Australie, de Nouvelle-Zélande, de Fidji, du Vanuatu et de Papousie. Il s’agit bien là d’un domaine régalien. Le ministre évoque donc les affaires extérieures, pour lesquelles des compétences calédoniennes permettraient une insertion plus active dans la zone. Et un relais de la diplomatie française …
L’autodétermination, ensuite, inscrite dans la Constitution. Gérald Darmanin propose un délai de deux générations, le temps de bâtir un projet commun, une société moins clivée, pour ne pas renouveler l’échec du scrutin binaire de l’Accord de Nouméa.
Enfin, histoire de rappeler que la France n’est plus une puissance coloniale, le ministre annonce un montant de contrat de développement 2024-2027 de 36 milliards, en plein fief indépendantiste, à Ouvéa. Cette dotation, aussi importante que le budget annuel du Vanuatu, illustre, s’il en était besoin, la différence qui existe entre une colonie et un territoire de la République.
Il y a donc un “avant” ce déplacement, et il y aura un “après”. Visite du président de la République, et trilatérale pour progresser et au moins conclure sur le corps électoral. À défaut, l’État “prendra ses responsabilités”.
“Pas de prime à la procrastination”, avait prévenu Darmanin. Lui non plus ne remet pas à demain ce qu’il avait prévu de faire aujourd’hui.
