Tu serais peut être étonné par l’étendue de la tristesse et le volume d’éloges qui accompagnent ta disparition. Tu le mérites bien, à l’issue du long chemin parcouru depuis cette époque où tes dribbles et ta vitesse émerveillaient nos yeux d’enfants sur le terrain de foot de la Place Bir Hakeim.
Tous les hommages ont évidemment été rendus pour ta magnifique carrière d’artiste du foot, avec au sommet, ta participation aux Jeux Olympiques de Mexico.
Ce qui apparaît moins, mais qui, à mes yeux, est tout aussi remarquable dans ta vie, c’est l’élan que tu as donné à ce qui est devenu, bien des années après, la reconnaissance des valeurs de ta culture originelle.
En ces années là, quand la Place Bir Hakeim était un espace de terre plate et dure, jalonnée à chaque extrémité par des buts de foot sans filet, la Calédonie était à mille lieues ce qu’elle est devenue aujourd’hui. Cette société, parfois présentée comme idyllique, était parfaitement clivée en groupes sociaux dominés par les Calédoniens. Les “indigènes”, plus tard les “autochtones”, côtoyaient les “viets”, parfois surnommés méchamment les “boukakes”, les javanais, parfois surnommés avec dédain les “cacannes”, les wallisiens, les tahitiens ou les antillais affublés de dénominations que je ne rappellerai pas, et qui venaient compléter la caste des “zoreilles” de la “colline aux oiseaux”.
Et toi, avec ton talent, ta gentillesse, tu as fait beaucoup, à cette époque particulière pour susciter le respect et la reconnaissance de tous, alors que les portes des collèges et des lycées étaient encore fermées aux Kanak.
Fort heureusement, les temps ont bien changé. Notre société demeure encore clivée, mais infiniment plus tolérante, plus inclusive, plus généreuse, même si tout cela demeure loin de la perfection
Toi, évoluant dans des clubs français, prenant pour épouse une îlienne de l’île de Beauté, tu as découvert les valeurs de la République que tu as honorée par tes choix politiques. Tu as été un artiste de grand talent dans le foot national. Tu as aussi un enfant de la coutume, un citoyen avant-gardiste et un rassembleur de toutes celles et ceux qui t’admiraient et t’estimaient. Merci pour tout cela Marco et salut.
GB