L’UNION CALÉDONIENNE EN PHASE AVEC SON TEMPS OU DÉPASSÉE ?

L’Union Calédonienne fut un grand parti de gestion et de réforme. Ce temps fut celui où sa composition répondait à sa devise « Deux couleurs, un seul peuple ». De la fin des années 60 au début des années 70, le parti a été miné par les scissions successives, provoquées par sa radicalisation. C’est cette radicalisation qui l’a mené progressivement à se replier sur une conception essentiellement kanak du territoire, produisant les événements de 1984. Pourtant, en 1988, un autre chemin avait été choisi, quasiment imposé par une situation nouvelle : celle d’un territoire plus moderne, pluri-culturel, différent de celui des années 70, dans une République sensible aux nécessités de décentralisation et de déconcentration. 

Alors que s’achève la période des Accords, l’UC, écartée de la présidence du gouvernement par le Palika, semble en perte à la fois de repères et de perspectives. Les outrances de son président ne reflètent pas autre chose. Le déni de réalité, la fuite en avant verbale sont-ils la solution d’avenir, où une posture figée dans le passé ?

Le discours actuel s’appuie à la fois sur l’utopie institutionnelle, et sur une forme de xénophonie. L’Union calédonienne raye d’un trait les principes de droit à l’autodétermination actés dans les Accords de Matignon et de Nouméa, et « simplifie » le débat démocratique en exigeant … une date pour l’indépendance. Ni la Constitution de l’État souverain qu’est la France, ni les valeurs défendues par l’Onu, de peuvent prendre en compte ces propos. S’en prenant clairement aux Calédoniens ne répondant pas aux critères des « victimes de l’Histoire », il revient au concept de l’indépendance kanak défini à Nainvilles-les-Roches par les indépendantistes et la FNSC, et refusée par Jacques Lafleur et son mouvement. 

De parti pragmatique des années 50 et 60, l’UC s’est réfugiée dans l’idéologie. Il ne s’agit plus de construire un pays prospère dans lequel les Kanak trouveraient toute leur place, et se préoccupant également le bonheur de ses populations, mais plutôt d’assurer une prépondérance politico-ethnique du groupe social originel. Combien même cette vision conduirait-elle inéluctablement au malheur de tous les habitants, et des plus fragiles en premier.

Il semble bien que les leaders vieillissants soient de plus en plus éloignés de la Nouvelle-Calédonie du troisième millénaire. Celle d’un pays qui doit affronter de nouveaux défis contre la pauvreté, les maladies, les chaos économiques, les menaces géopolitiques, celle d’un pays qui doit construire une société fondée sur les nouvelles réalités, et qui doit assurer au monde kanak l’émancipation sociétale davantage que tous les pouvoirs politiques.

L’image du lieutenant Pidjot aux commandes du chasseur-bombardier le plus sophistiqué du monde est, de ce point de vue, saisissante. Celle d’une mutation des Calédoniens et des Kanak à tous égards davantage conforme aux exigences modernes de notre société qu’à des concepts politiques périmés du passé.