
Hier, c’était la date ultime pour le paiement de l’impôt sur le revenu des personnes physique, l’IRPP, créé au début des années 80 par la coalition Front indépendantiste/FNSC, majoritaire au conseil de gouvernement et à l’assemblée territoriale. Il faisait suite à la mise en place de l’impôt sur les sociétés en 1975 qui s’était substitué à celui frappant les exportations de nickel. Depuis, l’arsenal fiscal de la Nouvelle Calédonie s’est considérablement étoffé. Les récents débat au congrès sur les nouveaux impôts montrent que le processus est loin d’être terminé ! Mais au fait, ces impôts, qui constituent l’immense majorité des ressources des budgets de la Calédonie, des provinces et des communes, à quoi sont-ils utilisés ?
LES CONTRIBUABLES DE LA PROVINCE SUD, PRINCIPAUX POURVOYEURS FISCAUX
Bien que les statistiques de répartition spatiale de l’impôt n’aient pas été mises à jour depuis longtemps -on se demande pourquoi …-, il est établi que les ressources fiscales de tout le territoire proviennent à plus de 90% des contribuables de la province sud. Les derniers chiffres en avaient chiffré le taux à 92%, pour 6% en province nord, et tout juste 2% en province Iles Loyauté.
Est-ce à dire que ces dernières vivent aux crochets du sud ? Non point. Le principe du rééquilibrage (50% de la ressource fiscale à répartir pour le sud, 32% pour le nord, et 18% pour les Iles) a officialisé une solidarité qui existait avant les Accords de Matignon, et a fixé cette fameuse clé de répartition.
Il n’empêche. Lorsque le gouvernement Mapou annonce un prélèvement supplémentaire de 42 milliards dans la poche des contribuables, ce sont ceux de la province sud qui sont d’abord visés …
LA FAMEUSE CLÉ DE RÉPARTITION
« Il faut savoir donner et pardonner », affirmait sans relâche Jacques Lafleur pour faire admettre les nécessaires concessions faites aux indépendantistes. Jamais, ce principe généreux n’a été remis en cause. C’est le « taux de la générosité » qui est aujourd’hui en cause. Pour quelle raison ?
Lorsque le rééquilibrage a été acté avec cette clé de répartition, le but était clair : il s’agissait d’alimenter les budgets des provinces Nord et Îles pour améliorer le sort de leurs populations d’une part, de les fixer d’autre part pour éviter l’exode vers Nouméa, à la recherche d’un mieux-être et d’emploi.
30 ans après, un élément fondamental reste à quantifier : l’échec ou non des actions de rééquilibrage menées par les responsables des provinces Nord et Iles. Cet échec est patent. Il mérite au minimum un examen attentif et objectif auquel les provinces excentrées répugnent.
L’exode vers Nouméa ? Après 30 ans de rééquilibrage, la population occupant les logements sociaux de Nouméa et des communes de l’agglo, l’extension des squats, notamment à Nouméa démontrent cet échec patent. Par exemple, la moitié de la population des Iles Loyauté vit dans et autour de la capitale !
Les centaines de milliards versées au Nord et aux Iles pour le rééquilibrage ? Le paragraphe précédent donne une illustration de l’échec relatif des responsables des collectivités concernées. Cet échec, réel, est cependant à relativiser.
Il paraît être conséquent pour la province des Iles Loyauté. Pire, les budgets provenant de la répartition du rééquilibrage servent également à des investissements … en province sud. Il en a été de même pour le Nord. Immobilier, hôtels, affaires commerciales, les sociétés financières de ces provinces ont été rappelées à l’ordre par la Chambre Territoriale des Comptes. Elles doivent intervenir sur le territoire des provinces qui les ont créées. Rappel apparemment vain …
Le Nord, lui, peut être crédité notamment d’un développement remarquable de l’agglomération baptisée zone VKP. Commerces, entreprises, logements, ces réalisations ont changé la situation dans cette région. Reste l’usine dont la Chambre des Comptes rappelait la situation périlleuse et les nombreuses anomalies du dossier, notamment en matière de gouvernance.
Mais pour l’heure, l’usine existe et elle est le moteur de centaines d’emploi. Fasse que la bonne conjoncture nickel renforce sa pérennité.
Quant à la province Sud, elle est en quelque sorte le dindon de la farce. Sa population a augmenté, depuis les Accords de Matignon, et 75% des habitants y ont été domicile ! La clé de répartition n’en tient nullement compte. La collectivité ne peut plus, structurellement, assumer ses charges obligatoires en faveur des populations dont elle a la charge, tout simplement parce la clé de répartition est désormais pénalisante. En revanche, les ressortissants des Iles perçoivent 5 fois plus de dotation publique que ceux du sud, et leurs responsables s’autorisent aussi bien un projet de compagnie aérienne internationale, qu’un pont à très faible trafic d’un coût de 2 milliards.
LES IMPÔTS PRÉLÉVÉS CHEZ LES CONTRIBUABLES SONT-ILS BIEN OU MAL UTILISÉS ?
La nécessité de l’impôt figure dans la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen. Il est destiné à assurer le fonctionnement des services aux citoyens, ainsi que sa sécurité. Pour ces nobles raisons, les citoyens adhèrent à l’impôt. Aujourd’hui, le principe demeure, mais le contribuable, pressuré de toutes parts, est en droit de demander des comptes à ceux qui utilisent ces sommes gigantesques prélevées.
Ce n’est jamais le cas.
Traduits dans les « budgets », ces impôts, qui résultent essentiellement du fruit du travail et de l’investissement, deviennent impersonnels. Les élus l’utilisent à la guise de leurs majorités, et le discernement relève trop fréquemment de la chose politique, voire politicienne, que du souci de bonne gestion et de bonheur du peuple.
Faudrait-il imaginer un conseil indépendant chargé d’observer la gestion et l’utilisation des impôts ? Peut-être que davantage de transparence, c’est-à-dire un peu moins d’opacité dans ce domaine qui touche la totalité des citoyens, suffirait. Mais beaucoup l’ont déjà promis …