
Les textes fiscaux sur l’extraction du minerai de nickel et sur son exportation constituent-ils une nouveauté ? Surement pas. Les anciens appliquaient une logique fort simple : la richesse du sous-sol doit profiter à la communauté, et son appauvrissement doit être compensé. En attendant, les textes gouvernementaux, livrés au congrès, ne sont toujours pas examinés. Rappel.
Dès … 1859, et après la découverte d’or près de Pouébo vers 1850, le gouverneur militaire crée un premier texte encadrant l’activité minières en Nouvelle Calédonie. Inspiré du Code Napoléonien, cette première réglementation stipule que « en échange du droit d’exploitation des minerais contenus dans le sous-sol qui leur est accordé, les concessionnaires miniers doivent payer une redevance annuelle fixe, en fonction de la superficie » et » « les propriétaires des mines sont tenus de payer à l’État […] une redevance proportionnée au produit de l’extraction« .
En 1873, un premier code minier calédonien regroupe les différents textes miniers en vigueur à l’époque. Il établit les règles qui encadrent la découverte du nickel. Les concessionnaires sont dès lors tenus de payer « une redevance fixe annuelle, déterminée par l’acte de concession ». Le code précise que « tous les produits des mines et des usines métallurgiques sont frappés d’un droit de 3 % ad valorem au moment de leur exportation hors de la colonie ». Dans le code calédonien de 1873, les deux principes fondamentaux de la fiscalité minière sont de nouveau inscrits. La redevance superficiaire fixe est clairement établie et, en ce qui concerne la taxe sur le produit de l’extraction, le texte mentionne le principe de la proportionnalité ad valorem, la valeur des minerais étant calculée au moment de l’exportation.
Depuis, les textes se sont succédés, modifiés, remplacés, mais toujours écrits dans l’esprit d’un revenu profitable à la collectivité.
En juillet 1975, et alors que la SLN est quasiment en situation de faillite, un nouveau mode de taxation lui est appliqué: 50 % des bénéfices de la société sont prélevés au profit du territoire qui exonère la société métallurgique des autres taxes et redevances existantes. En contrepartie de ses pertes de recettes, la Calédonie percevra une avance de l’Etat s’élevant au total à 34 milliards, dette effacée par Bercy en 2014. L’année 1975 aura également marqué l’avènement de l’impôt sur les sociétés en Nouvelle Calédonie
En janvier 1978, le territoire franchit une nouvelle étape. Il prend acte de la « surexploitation » du capital minier en créant une taxe de solidarité pour l’appauvrissement du territoire en minerais. Cette taxe, sur le modèle de la taxe ad valorem, prévoit de frapper uniquement les minerais de nickel exportés, à 1 % de la valeur FOB en deçà de 200 000 tonnes et à 2 % au-delà. Cependant, la crise qui a succédé au « boom » annule l’application de cette fiscalité.
En janvier 1979, l’Assemblée Territoriale abroge donc la toute nouvelle taxe de solidarité pour l’appauvrissement du territoire en minerais. Elle supprime également la surtaxe mise en place en décembre 1970 et elle ramène le taux de la taxe ad valorem à 4,5 % de la valeur FOB. Enfin, elle assujettit les sociétés minières à l’impôt sur les bénéfices qui finit par remplacer la taxe ad valorem. Cette délibération marque ainsi le passage d’une fiscalité minière calculée sur la valeur de l’extraction, à une fiscalité calculée sur les bénéfices des entreprises.
Toutefois, la taxe proportionnée à l’extraction des minerais extraits avait été maintenue dans le code et n’a été supprimée qu’en 1988.
Aujourd’hui, la Calédonie tourne à nouveau un regard sur ses fondamentaux miniers. Le paysage industriel a été bouleversé avec la construction de deux nouvelles usines métallurgiques s’ajoutant à la SLN. Les revenus de la fiscalité touchant au nickel aussi. Seule, d’ailleurs, parmi les métallurgistes, la SLN a versé des dividendes aux collectivités : plus de 40 milliards aux provinces via la STCPI. Quant à l’IS nickel, il a collecté plus de 20 milliards au milieu des années 2000. Une manne dont on connaît assez peu l’utilisation finale et qui n’a sûrement pas alimenté le fameux « fonds pour les générations futures » …