AVEC OU SANS PROVINCES : D’ABORD UN PROBLÈME DE SOCIÉTÉ

En prônant la suppression des provinces, Génération NC confirme son point de vue sur les grandes institutions nouvelles à bâtir pour la Nouvelle Calédonie. Le parti de Nicolas Metzdorf exprime une opinion qui remet en cause le fondement même des Accords de Matignon sur la création d’un « territoire fédéral » permettant un partage des pouvoirs au travers de collectivités de proximité. Il se situe également à l’inverse des courants favorables à une simplification institutionnelle par l’attribution de pouvoirs renforcés aux provinces et la minimisation de ceux du territoire. Pourquoi pas, et en même temps, pourquoi ?

Dans les semaines à venir, les projets de statut vont probablement s’affiner, afin de préparer la période de transition qui va s’ouvrir dès après les élections présidentielles et législatives. Argument de campagne ou pas ? Un statut ne forge pas une société. Il en est le produit. La vraie question préalable est donc : un statut pour quelle société calédonienne ?

L’INSTAURATION DE LA RÉPUBLIQUE A RÉSULTÉ DE RÉFLEXIONS SUR LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE
Lorsqu’est tombée la monarchie française en 1789, la proclamation des droits de l’homme et des citoyens fut-elle une simple résultante de la révolution ? La nouvelle société française naissant de ces bouleversements fut-elle le résultat des textes constituants et législatifs d’alors ?

Certainement pas.

S’agissant par exemple du principe essentiel de la séparation des pouvoirs, la thèse a été d’abord celle d’un grand philosophe des Lumières, Charles Louis de Secondat, baron de la Brède et de Montesquieu. Mort en 1855, c’est à dire bien avant la Révolution française, l’idée de Montesquieu exprimée au travers de ses ouvrages était celle d’une société française plus juste, débarrassée des abus de pouvoirs, apanage des monarchies et du pouvoir absolu. Attaché au respect de la personne humaine et à la liberté d’expression politique, il lui apparaissait que la meilleure façon de lutter contre les abus de pouvoir était d’en séparer ce qui relevait du législatif, de la Justice et de l’Exécutif.

La France s’est ainsi nourrie d’abord de réflexions sur la société, celles de Voltaire ou de Rousseau. Les penseurs et les philosophes ont progressivement conduit aux différentes Constitutions et aux institutions de la France moderne.

COMMENT DOIT ÉVOLUER LA SOCIÉTÉ CALÉDONIENNE ?
Serait-il exact que pour un statut autant qu’une personne, l’habit ne fasse pas le moine ? Probablement. Toute réflexion sur un statut présente un intérêt, ne serait-ce que par les interrogations qu’elle suscite. Mais il faut prendre en compte la situation particulière de la société calédonienne actuelle.

Cette société est fragmentée, à l’issue des trois consultations référendaires. Cette société subit une aggravation de ses inégalités. Cette société s’interroge sur son modèle économique. Cette société devient de plus en plus clivée par sa fracture éducative. Cette société est marquée par une rupture de cohésion entre la population Kanak, majoritairement indépendantistes, et la population calédonienne qui considère que l’archipel est définitivement français.

Le statut va-t-il résoudre par lui même tous ces graves problèmes ? Ou bien le statut doit-il être le meilleur outil pour répondre aux attentes et aux exigences de la société calédonienne ?

Voilà une première réponse à apporter.