
Il faut être prudent lorsqu’on lance de grandes incantations sur “autosuffisance alimentaire” ou encore sur “l’indépendance alimentaire”. Il y a un monde entre les prétentions et les ambitions. Non seulement la Nouvelle Calédonie ne peut tout produire en agro-alimentaire, mais ses protections éventuelles doivent aussi prendre en compte ses consommateurs souvent réduits en otages. Les études sérieuses de marché doivent également prendre une place essentielle dans ces ambitions. Ces principes ont manqué, par exemple, dans l’investissement colossal du Sheraton de Deva, et, dans un autre dossier, la sanction est tombée pour la fantasque aventure de Brebislait.
112 MILLIONS DE DÉFISCALISATION
Le projet est échafaudé dès 2007. L’investissement est de 503 millions avec 112 millions de défiscalisation locale sollicitée sur un montant éligible de 313 millions. La Sofinor est à la manœuvre. « Il s’agit pour nous d’une filière novatrice, en zone excentrée, qui va créer de la valeur ajoutée, des emplois et valoriser le foncier de la Sofinor », justifie la responsable de la communication de la holding dans un article économique publié par Aude Perron le 1er janvier 2012 sous le charmant titre “Une fromagerie dans la prairie”.
Une telle production a-t-elle sa place dans un marché aussi petit que la Calédonie ? “Cela ne semble pas inquiéter la Sofinor, bien au contraire. « Cela fait parti du risque commercial, mais en même temps, il s’agit du point fort du projet qui se positionne sur un marché de niche avec peu de concurrence », rapporte la journaliste. Bien vu …
REDRESSEMENT JUDICIAIRE EN 2019
Las, en dépit de ces espoirs, l’affaire échoit devant le tribunal du commerce 7 ans plus tard. Par un jugement du 2 septembre 2019, celui-ci prononce la mise en redressement judicaire de “la SAS Brebislait dont le siège social est 683 avenue de Teari, lotissement Les Cassis” à Koné.
Pourtant cette activité avait fait partie du Groupe Nord Avenir, fort de 50 sociétés, parmi lesquelles une holding du “pôle agro”, et 5 sociétés du secteur agricole. Toute cette synergie potentielle a été vaine.
VENTE AUX ENCHÈRES AUJOURD’HUI
L’épilogue de l’aventure se déroulera aujourd’hui. Selon un avis du commissaire priseur concerné, la vente aux enchères du matériel de Brebislait sera proposée au public intéressé mercredi 7 juillet.
Personne ne peut évidemment se réjouir de cet échec. Mais l’affaire aura tout de même coûté quelques centaines de millions, et aux contribuables, et aux instances qui ont soutenu l’entreprise. Ce qui parfois revient au même.