LE NOUVEAU GOUVERNEMENT : QUAND ET QUI ?

Maintenant que le gouvernement Santa est tombé, des questions sont sur toutes les lèvres : quand sera mis en place le nouveau gouvernement ? qui sera le prochain président ? À quelle formation politique appartiendra-t-il ? Que pourra-t-il faire pour sortir du bourbier actuel ?

Quand ? Dans un premier temps, le Congrès devra fixer le nombre de membres de l’Exécutif, le maximum étant onze. Puis viendra le dépôt des listes, ce qui donnera vraisemblablement la composition du gouvernement II de l’actuelle mandature. Le Congrès sera alors convoqué pour procéder à l’élection des membres du gouvernement selon un scrutin de liste à la proportionnelle. Seuls les groupes régulièrement constitués peuvent présenter une liste, ce qui pose un problème à l’Eveil Océanien. Le parti de Mila Tukumuli ne possède pas un nombre suffisant d’élus pour former un groupe, et pour l’heure, il a intégré la formation indépendantiste UC-FLNKS-Nationalistes.

Les « ministres » étant désignés, le gouvernement sera convoqué par le Haut Commissaire dans les 5 jours pour élire son président. Puis son Vice-président.

Une fois constitué, le gouvernement devra procéder à la répartition des secteurs que chacun doit « animer et contrôler », le président disposant seul de pouvoirs individuels. Ce n’est qu’une fois l’ensemble de la procédure accomplie que l’Exécutif sera concrètement en fonction.

Dans l’intervalle, le précédent gouvernement -en l’espèce, le gouvernement présidé par Thierry Santa- demeure en fonction. Il est chargé de « l’expédition des affaires courantes ». Toutefois, en cas d’urgence ou de circonstances graves, il peut exceptionnellement intervenir. Ce qui, manifestement, est la situation de l’usine du Sud dans laquelle 3000 emplois sont en péril.

Pour quelle durée ? Depuis la modification de la loi Organique due aux démissions à répétition des membres de Calédonie Ensemble au gouvernement, qualifiées de « manœuvres électorales », aucune nouvelle démission collective ne pourra intervenir pendant une période de 18 mois, soit jusqu’en juillet 2022.

Qui sera candidat ? Côté indépendantiste, on verra d’abord qui sont les partants … Pour ce qui est du Palika, Jean-Pierre Djaiwe et Valentine Eurisouké devraient être reconduits. En revanche, des rumeurs de règlements de compte circulent déjà sur la liste de l’UC.

En ce qui concerne Calédonie Ensemble, ce sera la réponse à une possible divergence de vues entre Philippe Germain et le parti. L’ancien président du gouvernement a pris quelques positions personnelles depuis son élection, dont le vote sur l’autorisation d’exportation supplémentaire de 2 millions de tonnes de minerai sollicitée par la SLN. Réponse dans quelques jours.

Pour ce qui est de l’Avenir en Confiance, la première question concerne la participation éventuelle de l’Eveil Océanien alors que ce parti a intégré le groupe UC-FLNKS au Congrès. Quant aux membres Avenir en Confiance, ils ont acquis une expérience de l’Institution, ce qui pourrait militer en faveur de leur reconduction dans un contexte politiquement explosif et crucial. Thierry Santa en sera-t-il après avoir exercé la présidence et acquis une connaissance approfondie du gouvernement ?  Réponse également dans quelques jours.

Qui sera président ? C’est l’une des questions clés qui se posent aujourd’hui. Un indépendantiste à cette fonction, s’ajoutant à la présidence indépendantiste du Congrès, confèrerait une image forte aux séparatistes au plan intérieur, national et international. Mais les indépendantistes ne possèdent pas seuls la majorité. Alors les regards se tournent vers l’Union Océanienne et Calédonie Ensemble. Qui oserait ?

A moins que les indépendantistes se résolvent à porter à la tête du gouvernement une personnalité extérieure à leurs rangs : soit une personnalité de la société civile réputée proche, soit une personnalité proche d’autres formations ou en faisant partie.

Qui sera Vice-président ? C’est une question qui a toujours fait débat entre l’Uni-Palika, et l’UC-FLNKS. Cette fois, un désaccord ferait désordre dans les rangs indépendantistes.

Quelle répartition des secteurs ? Voilà un sujet qui interpelle particulièrement le monde économique, les contribuables et les autres collectivités.  Le secteur des mines, celui de l’économie et celui de la fiscalité seront au cœur des préoccupations. Les indépendantistes ont critiqué « la persistance des difficultés économiques et sociales », le processus de vente de Vale NC, le retard du vote du budget 2021 et « la crise de confiance ». L’attribution de ces secteurs majeurs apportera une première indication sur la politique qu’ils comptent mettre en œuvre.

Le reste n’est pas anodin pour autant. Quid de l’agriculture, de l’emploi, de l’enseignement, de l’énergie, de la santé et des affaires sociales, avec en toile de fond, la situation de la Cafat ?

Enfin, élu à la proportionnelle, le gouvernement comportera également des membres de l’Avenir en Confiance. Quels secteurs leur seront réservés par la nouvelle majorité ?

Quelles relations avec l’Etat ? Le ministre des Outre-mer a exprimé le vœu que le gouvernement soit constitué rapidement, et a confirmé la volonté de dialogue du gouvernement de la République. Les indépendantistes déplorent « l’absence d’un dialogue constructif avec l’Etat » … mais ce sont eux qui ont quitté la table des discussions en fixant comme « préalable » la vente de Vale NC au repreneur qu’ils désignent eux-mêmes. Persisteront-ils ?

Par ailleurs, s’ils ont également été très critiques des moyens apportés par l’Etat durant la crise du Covid, et mis fin aux discussions avec Sébastien Lecornu, les indépendantistes peuvent-ils se passer de l’aide la France ? Difficile posture pour ceux qui veulent s’en séparer.

Quelles suites pour la Calédonie ? Le territoire connaît une crise sans précédent depuis les années 1975 -date où la SLN était en quasi-faillite-, et 1984, date de blocage du fonctionnement normal de la collectivité pour cause de troubles de la paix civile.

La conquête du pouvoir par les indépendantistes ne correspond pas au pays réel dans lequel les loyalistes sont politiquement majoritaires, et démographiquement, très majoritaires. Cette situation périlleuse est-elle compatible et durable ?

La résolution des immenses problèmes de l’heure contribuerait évidemment à donner de la crédibilité à une majorité de circonstance. Dans le cas contraire, et y compris à l’égard de leurs partisans, les indépendantistes joueront peut-être une partie de leur avenir politique.