
Les événements de 1984 avaient moins d’ampleur, mais ils reposaient sur le même fondement : forcer la main des Calédoniens et de l’Etat pour imposer le point de vue indépendantiste. Pourtant, depuis, deux Accords avaient rétabli la paix, et une perspective. Mais l’Accord de Nouméa, en faisant croire à un « destin commun », a montré l’ineptie de cette illusion qui est apparue clairement au fil des deux précédents référendum. Aujourd’hui, les indépendantises n’acceptent plus la démocratie et ne retiennent de l’Accord de Nouméa que ce qui les satisfait. Tentation d’un retour à 1984 ?
LA VIOLENCE PLUTÔT QUE LA DÉMOCRATIE
La Nouvelle Calédonie vit en démocratie. Ses règles sont édictées à la fois par la Constitution française et par son statut issu des accords de Matignon et de Nouméa. Ce statut, créé en 1988, modifié en 1998, a été accepté au suffrage universel.
Il en résulte concrètement des assemblées élues chargées des décisions pour les collectivités les concernant. Ces décisions peuvent être contestées devant des juridictions, la Justice constituant un pouvoir indépendant.
Les indépendantistes, regroupés soit dans des structures comme l’Ican ou un collectif baptisé usine du sud/usine pays, ont décidé de contester la procédure et le résultat d’une transaction internationale à caractère privé. Ils veulent également imposer un candidat, la Sofinor, pour le bénéfice de cette transaction. Ils contestent, enfin, la compétence d’une assemblée régulièrement élue, l’assemblée de la province Sud, actionnaire de l’entité faisant l’objet de la transaction, et juridiquement en charge de décisions majeures pour la conclusion de la dite transaction.
Plutôt que de s’adresser à des tribunaux ou à des assemblées, les indépendantistes ont choisi l’action violente, succession de délits et d’entraves à des libertés fondamentales. Ce faisant, ils se placent délibérément hors la démocratie.
Revendiquant la constitution d’un Etat, Kanaky-Nouvelle Calédonie, ils en donnent ainsi l’image.
EN DEHORS DE L’ACCORD DE NOUMÉA
L’Accord de Nouméa était initialement « la solution consensuelle ». Un consensus sur une voie menant à un choix institutionnel, mais surtout, une procédure sans violence tirant leçon des Accord Matignon qui avaient rétabli la paix en Nouvelle-Calédonie après 4 années de guerre civile, puis de troubles soldés par le drame d’Ouvéa.
Cet esprit a été traduit dans un statut, modifié, imparfait, fragile sur le corps électoral, mais accepté par tous.
Des institutions centrales, nouvelles, dotées de compétences considérables, ont été mises en place : les provinces. Jamais leurs compétences n’avaient été contestées.
Les indépendantistes, en choisissant le retour à la violence, ont remis en cause deux principes fondamentaux, notamment, de l’Accord de Nouméa :
– l’esprit de concorde, qui avait pour ambition de ne pas revenir à la violence, marqueur d’une période dénommée « les événements »,
– le respect des institutions centrales que sont les provinces. En agressant la province Sud pour lui imposer, dans une transaction relevant de son territoire, une société financière d’une autre province, ils foulent au pied la compétence d’une assemblée régulièrement élue.
DES RUPTURES AUX CONSÉQUENCES CONSIDÉRABLES
En agissant ainsi, les indépendantistes ont provoqué plusieurs ruptures.
Une rupture sociologique, découlant en particulier de la racialisation des violences, et dont les effets sont totalement mortifères pour le « vivre ensemble ». Destin commun et Vivre ensemble sont aujourd’hui des slogans à la limite du ridicule, et revêtent, au mieux, un caractère d’obligation.
Une rupture de concorde pour le futur institutionnel. Comment imaginer que les événements actuels, qui perdurent, feront accepter, par l’une ou l’autre des parties, le résultat d’un troisième référendum ? Celui-ci, d’ailleurs, paraît hors contexte, et ne correspond plus à l’esprit de l’Accord de Nouméa.
L’opposé de « destin commun » et de « vivre ensemble » n’est-il pas « destins séparés » et « vivre chacun de son côté » ?