
C’est l’histoire d’un projet industriel repris par des politiques et dont le traitement technique et l’inscription dans l’évolution technologique n’ont pas été à la hauteur de l’enjeu. Au cœur de ce projet, le besoin en électricité de l’usine de la SLN à Doniambo, une usine datant de 1972, en quasi fin de parcours et produisant un courant trop cher. La SLN projette de la remplacer par une unité plus moderne au charbon livrable en 2011. Mais l’affaire traîne, en raison des difficultés financières qui voient le jour. Et puis des débats -salutaires- s’ouvrent sur la pertinence environnementale du charbon …
LA SOLUTION CENTRALE À GAZ
En 2015, la puissance publique décide de prendre le dossier en main. Ce sera une centrale à gaz qui devient un projet « pays ». C’est à dire financé par le contribuable. Mais pas que, puisque la SLN est invitée à rejoindre le tour de table.
Des structures publiques sont mises en place, agence de l’énergie, NC énergie, de quoi à la fois conduire le dossier administratif et technique ainsi, évidemment, que le financement. Un investissement colossal. On parle de 70 milliards, au bas mot. Une défiscalisation est sollicitée et obtenue de Bercy, et le consommateur calédonien est contraint de mettre la main à la poche, en étant taxé d’un surcoût sur le diesel.
CHANGEMENT DE GOUVERNANCE CALÉDONIENNE
Tandis que le dossier tarde à se concrétiser, les élections provinciales passent par là. Changement de gouvernance politique pour le pays et nouvelle réflexion sur la pertinence globale du projet.
Cette analyse prend en compte des facteurs majeurs : les besoins de la SLN, ce qui doit induire la taille et le coût du projet, la nature du combustible, le financement et le calendrier de réalisation.
LES BESOINS DE LA SLN
La SLN demeure aujourd’hui une entreprise essentielle pour l’économie calédonienne, et son capital est détenu par des intérêts français. Elle se bat pour retrouver de la compétitivité et retrouver le chemin des profits. Elle subit, depuis plusieurs années, de lourdes pertes générant un déficit de trésorerie comblé par un emprunt qui va s’épuiser. Ses fours consomment beaucoup d’électricité, une énergie très chère dont le coût doit impérativement baisser pour son redressement. On connaît ses besoins énergétiques actuels. Mais quid de l’avenir de Doniambo à deux ou trois décennies ? Il appartient à la « vieille dame » comme Eramet, sa maison mère, de préciser des perspectives.
QUESTIONS SUR L’OPTION GAZ
Après l’option charbon définitivement abandonnée, c’est celle du gaz qui a été retenue. Est-elle la plus pertinente ? A l’évidence, en 2020, ce n’est plus le cas. Au plan environnemental, le gaz a été présenté comme une source plus propre. Or, elle est fossile, ce n’est pas la plus propre, et elle demeure soumise à des conditions d’approvisionnement qui interrogent. Autre question : dans le cas de la construction de la centrale, tous les éléments ont-ils été prise en compte, sur le transport, sur le stockage, et pour quel coût final ?
IDÉOLOGIE OU ÉCONOMIE
Bref, présentée comme la solution idéale en 2015, la filière gaz a perdu de sa superbe. Plusieurs réponses de substitution existent, dont certaines, bien plus séduisantes.
La centrale « pays », quant à elle, était devenue davantage idéologique qu’économique. Elle est destinée essentiellement à alimenter une usine située à Nouméa. Les deux autres usines métallurgiques possèdent leur propre centrale. Pour le reste du « pays », c’est à dire les autres consommateurs, la production d’électricité sera assurée intégralement par des énergies propres et renouvelables dans trois ans, c’est à dire avec près de sept ans d’avance sur les objectifs initiaux. Dans ces conditions, est-il normal que la puissance publique, c’est à dire le consommateur et le contribuable calédoniens financent ces nouvelles installations ? La décision et le lancement du projet nouveau lui incombent naturellement, mais il serait pertinent de revenir à un financement privé.
UNE NOUVELLE FEUILLE DE ROUTE PRÉSENTÉE AU CONGRÈS AVANT LA FIN DE L’ANNÉE
Membre du gouvernement, Christopher Gygès a indiqué une feuille de route relativement précise pour répondre aux besoins de la SLN estimés aujourd’hui à 150 mégawatts : un appel à projet pour la construction d’une ferme photovoltaïque de 50 mégawatts pour alimenter rapidement, dans un premier temps et à bas coût, un tiers des besoins de la SLN, et pour le solde, un appel à manifestation d’intérêt intégrant trois contraintes : la caractère propre durable de la future centrale, un coût de l’énergie réduit, un financement assuré par les opérateurs. Objectif : proposer une feuille de route actualisée » aux membres du Congrès avant la fin de cette année.
À VENIR : DOSSIER N°2 « SOLAIRE, HYDROGÈNE, GAZ, AUTRES ? »