Les partis indépendantistes kanak seraient-ils bien inspirés de s’associer à la lutte contre la délinquance, notamment chez les jeunes ? Certainement. Car cette délinquance a déjà atteint des espaces sociaux kanak, et entreprend de s’attaquer aux Iles, jusque là, relativement préservées. Se retrancher derrière « les conséquences de la société coloniale » pour justifier une forme d’inertie dans cette lutte aura des conséquences graves sur la société kanak. Les espaces urbains vont résoudre, un jour ou l’autre, la montée de la délinquance. Mais quid des espaces coutumiers ? Laxisme.
AUCUNE PRISE DE POSITION
Depuis la fin des années 90 que monte la délinquance en Nouvelle-Calédonie, les partis indépendantistes se sont refusés à prendre officiellement parti pour la lutte répressive contre la délinquance. Aux mesures proposées, en général par les partis loyalistes, ils ont, en permanence, exprimé des réserves, se bornant à réclamer davantage de prévention plutôt que la répression.
Certains responsables, comme Harold Martin à Païta, ont même suggéré que cette délinquance était soutenue par la mouvance séparatiste pour des raisons politiques.
« LA TRIQUE » N’ÉTAIT PAS DE LA PRÉVENTION
Pourtant, dans le monde coutumier, la prévention était le fruit de l’éducation coutumière. On y expliquait les risques encourus en cas de transgression des règles. La société kanak n’était guère permissive. La punition par « la trique » était une sanction plutôt légère. On peut reprendre les écrits sur les terribles punitions de l’adultère ou du vol. Tout ne réglait pas par « une coutume de pardon ». Les délits commis par des étrangers kanak, et même parfois, des affronts, se soldaient souvent par des guerres et des morts.
DISPARITIONS DE L’ÉDUCATION À LA COUTUME ET DES SANCTIONS COUTUMIÈRES
Aujourd’hui, l’éducation coutumière a pratiquement disparu pour la plupart des enfants kanak. Ils vont à l’école dès le plus jeune âge, au lieu d’être aux côtés de leurs tontons jusqu’à l’âge adulte, pour connaître tout des règles sociales du clan et de l’aire coutumière.
Les sanctions, elles, ont pratiquement disparu. La faute, d’ailleurs, à la nouvelle société issue de la période coloniale passée comme des règles actuelles, qui punit les auteurs d’atteintes corporelles.
LES PARTIS KANAK INDÉPENDANTISTES N’ONT PAS SU S’ADAPTER
Devant la montée de la délinquance, notamment chez les jeunes Kanak, les partis indépendantistes kanak ont plutôt choisi, tout en rendant « les autres » responsables de cette dégradation, de donner des leçons.
Celles-ci, en général, tout en s’adressant aux partis loyalistes et à l’Etat, se sont bornées à appeler à une prévention ciblée. Et parfois, en justifiant les actes délictueux.
Or, ils ne se sont pas aperçus que dans les provinces qu’ils gèrent, la société kanak elle-même est agressée par les jeunes délinquants.
DÉGRADATION DE LA SOCIÉTÉ KANAK AUX ILES, AU NORD ET AU SUD
On connaît, depuis près de 3 décennies, les dégâts causés par la délinquance au sein même de la « tribu » de Saint Louis. Depuis, en passant par Bangou et Thio, la délinquance s’est propagée dans des espaces coutumiers authentiques, au Nord, notamment à Canala et à Houailou.
Dans certains régions, plus isolées, « la coutume tient bon ». Au Nord Est, au Nord, ou au Nord Ouest notamment.
Aujourd’hui, ce sont les Iles qui sont atteintes.
UNE DÉLINQUANCE DANS UN MILIEU PUREMENT KANAK INDÉPENDANTISTE
Aux Iles, il sera difficile de botter en touche dans les tribunes du colonialisme, dans le domaine de la délinquance. La région n’a guère subi de colonisation foncière, et, à la Province, aucun élu loyaliste ne siège !
TENTATIVE DU SÉNAT COUTUMIER
Certes, ces récents actes de délinquance dont le Lycée de Wé a été victime ne sont pas encore des faits perpétrés à grande échelle. Mais il n’empêche : la gangrène est présente.
Seul, peut être, le Sénat Coutumier a voulu lancer des signaux d’alerte. En proposant la reconnaissance du socle des valeurs kanak, il a inclus, dans cet exercice, une forme de lutte contre les risques de délinquance.
En vain. Les Kanak, eux-mêmes, n’ont guère prêté attention à ce travail intéressant.
Dans cette évolution néfaste, sur fond de cannabis et d’alcool, la société kanak risque d’être un peu plus abimée.
Sous peine d’endosser une lourde responsabilité, les partis indépendantistes kanak, doivent se poser la question des conséquences de la délinquance sur l’identité kanak, une identité qu’ils prétendent porter.