Enfoncée dans une crise économique qui ne fait que s’aggraver, l’économie calédonienne a-t-elle besoin d’un soutien sous forme de perfusion rapide pendant les quelques années d’incertitude des deux prochains referendum ? Seule, Sonia Backes s’est exprimée sur ce sujet en proposant un Plan de Relance pour le prochain Comité des Signataires. Edouard Philippe, le Premier ministre, avait déjà pointé du doigt cette problématique. Attente.
Personne ne croit plus que « l’économie ne s’est jamais aussi bien portée« . La destruction d’emplois dans le secteur privé, véritable baromètre de la récession, risque de s’aggraver avec la situation gravissime que connait la situation de la SLN. Les incertitudes, liées au score décevant pour les loyalistes au récent referendum, et la perspective annoncée par les indépendantistes, des deux autres prochains scrutins, va ajouter à la crise actuelle.
Le gouvernement annonce un léger retour à la croissance, mais plus personne n’y accorde du crédit. La « baisse des prix de 10 à 15% » est considérée comme un échec avec une augmentation de 0,9% en octobre. Les multiples retouches ont fait naître le sentiment d’arrangements au profit de quelques uns.
Quant aux politiques éminents, leur forme d’arrogance sur le « 70%-30% » leur revient comme un boomerang.
POPULATION INQUIÈTE, ÉCONOMIE EN BERNE
La population, livrée à ses incertitudes, est en proie à des préoccupations plus terre à terre que de doctes analyses politiques. Les loyalistes doutent. Témoins, ces annulations de compromis de vente, ces projets que l’on gèle. Ces travailleurs sans emplois qui recherchent un travail. Ou encore, le secteur sensible du BTP qui souligne ses carnets de commande en berne.
L’EXEMPLE AUSTRALIEN
Dans ces conditions, un soutien ne peut venir que du secteur public. A l’image de l’Australie, qui pour juguler les effets des la crise des « subprimes » américaines chez elle, avait injecté en 2010 dans le pays, sous diverses formes, 42 milliards de dollars, soit quelques 3400 milliards de FCFP.
Grands travaux et facilités bancaires en ont été les ressorts. » En pleine crise, les Australiens se sont retrouvés avec de l’argent à dépenser… en plus. « Le secteur minier n’emploie que 1,5 % des actifs, contre 15 % pour le secteur des ventes. Se concentrer sur la consommation était donc la bonne méthode. Les gens ont pu continuer à dépenser et à épargner », souligne M. Minack (Analyste chez Morgan Stanley – Ndlr). Le gouvernement a aussi stimulé le secteur de la construction : dans presque toutes les écoles de Sydney, des panneaux expliquent que des travaux sont engagés dans le cadre du plan de stimulus« , avait alors écrit le journal « Le Monde ».
Bien sûr, la Nouvelle-Calédonie doit envisager une injection de fonds dont le caractère massif est d’une toute autre échelle ! Et bien sûr, l’état dégradé des finances publiques ne permet pas d’envisager cette injection grâce aux budgets locaux …
AVANCE DE 34 MILLIARDS FCFP DE L’ETAT EN 1975
C’est donc l’Etat qui peut intervenir. Il l’avait déjà fait en 1975, alors que la SLN était en faillite, et que le territoire devait renoncer à un système fiscal de taxation des exportations de produits au profit d’un impôt sur les sociétés, inexistant alors. Un système de compensation avait été conclu entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie, aboutissant à une avance remboursable cumulée de 34,3 milliards FCFP -soit quelques 200 milliards de nos francs actuels-. Une avance, au demeurant, effacée il y a une dizaine d’année.
La Polynésie, elle aussi, avait reçu une avance de trésorerie -5 milliards FCFP- en 2013, associée au Pacte de Croissance qu’à l’époque, Gaston Flosse avait proposé.
Pour la Nouvelle-Calédonie, une avance remboursable importante, adossée à un différé adéquat, est une des seules solutions permettant à l’économie de ne pas sombrer dans les mois à venir, dans un dangereux processus d’accélération de crise.
TROIS CONDITIONS
Deux conditions président d’abord à une telle hypothèse : la première est que cette décision soit prise rapidement, la seconde, c’est que l’inflation soit surveillée avec soin et ses effets éventuels, jugulés.
Un troisième condition doit se conjuguer avec le caractère conjoncturel d’une telle mesure : la révision du modèle économique calédonien, et l’établissement d’un cadre fiscal, social et de formation susceptible de favoriser la croissance.
LES SECTEURS DU BTP ET DE LA BANQUE EN PRIORITÉ
Ce soutien devrait viser en priorité deux secteurs clé de l’économie : le BTP, qui en est dans l’attente, et le secteur bancaire, en panne de refinancement, et pour lequel, la Calédonie devient une zone à risque.
Plusieurs opérations relevant du BTP ont été citées par Sonia Backes : la poursuite de la route à 4 voies le long de la côte Ouest, et a minima, jusqu’à Tontouta, la voie d’accès à Mont Dore sud par le bord de mer, ou encore des opérations d’équipements à caractère économique.
Elle a également souligné la nécessité d’encourager les banques à desserrer l’étau du crédit. Vaste sujet où le concours de l’Etat est vital.
Pour le reste, comme pour ces sujets essentiels, une grande concertation s’imposerait, si une solution à court terme était mise en place.
Une vaste concertation qui serait la bienvenue après le clivage sans précédent de la Nouvelle-Calédonie en 3 « pays » exigeant des destins opposés, une fracture révélée par les résultats du scrutin d’autodétermination.