Depuis le dépôt des listes de candidats pour l’élection du prochain gouvernement, on connaît mécaniquement la composition du prochain gouvernement. Il sera composé de 5 membres de la « plate-forme », Philippe Germain, Cinthya Ligeard, Hélène Iékawé, Bernard Deladrière et Nicolas Metzdorf, d’un membre des Républicains Calédoniens, Christopher Gyges, de 3 membres de l’UC, Gilbert Tyuienon, de Jean-Louis d’Anglebermes et de Didier Poadyaliwane, de 2 membres du Palika, Dewe Gorodey et Valentine Eurisouké.
Ont été ainsi levées les interrogations sur la reconduction de Dewe Gorodey et Antony Lecren.
Cependant, pour les futurs élus lors de la séance du Congrès jeudi prochain, « tout » reste à faire, et probablement le plus dur. La moitié des travaux d’Hercule …
ÉLIRE LE PRÉSIDENT
Il leur faudra d’abord former officiellement le gouvernement pour qu’il fonctionne, en élisant, au moins, le Président. Les loyalistes, en majorité, ne le pourront qu’avec la voix de Christopher Gyges. Et là, les conditions émises – une inflexion de la politique économique -, n’ont pas reçu de réponse. La situation est d’ailleurs ambigüe. En effet, les partenaires de Calédonie Ensemble dans la plate-forme n’ont-ils pas, depuis 3 ans, critiqué la politique économique conduite sous l’égide de Philippe Germain ? Mais au total, les chances d’une élection de ce dernier, candidat à sa succession, jeudi prochain, sont infimes.
RÉPARTIR LES SECTEURS
Dans l’intervalle, les élus tenteront probablement de se mettre d’accord sur la répartition des secteurs. Pour les sortants, la solution la plus probable sera la reconduction des directions à animer et contrôler. Restera le secteur sensible de la fiscalité et du budget, placé jusque là sous la responsabilité de Philippe Dunoyer. S’il reste dans le giron de Calédonie Ensemble, seul Philippe Germain paraît susceptible de l’assumer. Mais sera-ce considéré comme une trop grande concentration des pouvoirs ?
REFONDER LA COLLÉGIALITÉ
Le nouveau gouvernement devra probablement s’interroger sur le retour à un fonctionnement collégial normal. Nombreuses ont en effet été les critiques sur la gouvernance solitaire du Président sortant. La composition de l’Exécutif, les suites des législatives feront qu’un tel exercice, s’il se perpétue, fera l’objet de remous permanents au sein de l’institution.
AFFRONTER LES DÉFICITS ABYSSAUX DES RÉGIMES SOCIAUX
Il en va de la pérennité des régimes sociaux en Nouvelle-Calédonie. Tous sont dans le rouge, à l’exception, pour la Cafat, du régime des retraites. La situation est explosive, et sans des réformes en profondeur, les régimes exploseront, et une partie des finances publiques avec.
Il en faudra, du courage politique, car la recette est sans alternative : maîtrise draconienne des dérives des coûts de la santé et des couvertures sociales, réduction des prestations, augmentation des prélèvements, interventions fiscales.
INFLÉCHIR LA POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET FISCALE
Chez les loyalistes, il existe une majorité favorable à une solide inflexion de la politique économique et fiscale de la Nouvelle-Calédonie. Ce sera donc un bras de fer interne, ou rapidement, un délitement de la solidarité au sein de la plate-forme aussi bien au gouvernement qu’au Congrès.
L’urgence sera la définition d’un nouveau modèle de développement car l’échec de la recette liée à la relance de la consommation par le contrôle des marges des entreprises est patent.
Rien ne permet, par ailleurs, d’affirmer que l’usine du sud restera en activité au delà du 1er janvier 2018. Et si elle poursuivait ses opérations, qui peut douter que ce serait au prix d’une réduction drastique de sa masse salariale ?
Quant au reste, en dépit des conclusions quelque peu lénifiantes de l’IEOM et du Cerom sur la situation économique, la Nouvelle-Calédonie s’enfonce de plus en plus dans une crise se traduisant par des pertes d’emploi, des fermetures de commerces et d’entreprises ainsi que par une absence d’anticipation d’investissements.
PRÉPARER LES ÉLECTIONS PROVINCIALES
Officiellement, le scrutin majeur est celui d’autodétermination. Et pour la Nouvelle-Calédonie, c’est une réalité. Mais il s’agit d’un scrutin majeur pour le devenir institutionnel du pays, pas pour les enjeux de pouvoir.
Le véritable enjeu de pouvoir, ce sera le scrutin des prochaines provinciales, en mai 2019 ou plus tard. Le résultat de cette consultation déterminera en effet la majorité en Province sud, au Congrès, au gouvernement. Bref, dans les centres de décision du pays.
Or, les résultats des dernières élections législatives, et notamment le nombre impressionnant d’électeurs qui ont boudé les urnes, doivent être au centre de toutes les analyses. Désintérêt générationnel de la politique, défiance à l’égard des partis « traditionnels », volonté silencieuse de changement ? Seuls quelques sondages permettront de mieux cerner l’état de l’opinion publique locale, et notamment, des sentiments de ceux qui votent aux provinciales.
Cette échéance est déjà au cœur des calculs. Elle deviendra de plus en plus prégnante au cours de 19 mois prochains …