
Le gouvernement local avait, à l’unanimité, soutenu la candidature de Claude Constant, ancien SGA du gouvernement, puis directeur de cabinet de Léopold et de Iékawé chargés de l’enseignement, pour succéder au précédent Vice-Recteur de la Nouvelle-Calédonie. Face à lui : Jean-Charles Ringard, candidature présentée par Najat Valaud Belkacem. Le ministère de l’Education nationale ne l’aurait pas entendu de cette oreille, pas plus que l’Etat qui aurait décidé, selon RRB qui l’annonçait dès samedi matin, de choisir un homme du sérail, l’Inspecteur général de l’administration de l’Education nationale Jean-Charles Ringard. Camouflet.
« C’est la France qui paie » : L’ETAT DÉPENSE 100 MILLIARDS CFP POUR L’EDUCATION EN CALÉDONIE
Le débat, à Nouméa, avait tourné autour de l’emploi local, certains ne cachant pas leur sentiment qu’il fallait, avec un candidat diplômé, choisir « un local plutôt qu’un zoreille ». A l’occasion d’ailleurs, il a été oublié qu’un autre calédonien avait déjà exercé un intérim du Vice-Recteur et avait postulé à la fonction de Vice-Recteur, Pierre Boyer… Les enjeux, pourtant, ne se limitent pas à cette considération réductrice.
L’Etat, au travers du ministère de l’Education nationale, une sorte « d’Etat dans l’Etat » comme peuvent l’être Bercy ou la Défense nationale, dépense en Nouvelle-Calédonie chaque année aux alentours de 100 milliards FCFP. Ce n’est pas rien.
C’est qu’en effet, le territoire s’est vu confier l’essentiel des compétences dans le public comme le privé, mais il finance la quasi-totalité de ses dépenses … avec l’argent de l’Etat. Si la chanson « c’est la France qui paie » devait trouver une illustration, c’est ce domaine qui pourrait la lui fournir.
UN HOMME DU SÉRAIL POUR DÉFENDRE LES INTÉRÊTS DE L’ÉTAT
Or l’Etat s’est montré à plusieurs reprises soucieux des interprétations du transfert de compétence, trop favorables pour certains « mandarins » de la rue de Grenelle, à la Nouvelle-Calédonie. Il s’agit notamment de la fameuse MADGG (Mise à Disposition Globale et Gratuite de 5000 personnels-NDLR), des conditions de stages de titularisation de personnels locaux, de mesures transitoires ou encore de la construction des Lycées du Mont Dore et de Pouembout, pourtant inscrits dans les Accords de Nouméa. De ce point de vue, l’ancien Vice-Recteur, Patrick Dion, passait à Paris pour « trop calédonien » en ce sens qu’il a défendu bec et ongles les intérêts du gouvernement local et du Congrès.
Dans ce contexte, il paraîtrait probablement préférable aux responsables parisiens de nommer un homme du sérail et d’expérience –Claude Constant étant depuis de nombreuses années hors du circuit actif de l’Education nationale-. Et pour celà, quoi de mieux qu’un homme du ministère.
UN RAPPORT
SUR LES TROUBLES DU LANGAGE
D’autant que Jean-Charles Ringard, soutenu par deux poids lourds que sont Ségolène Royal et Jack Lang, n’est pas un inconnu. Il a la réputation d’être un haut fonctionnaire « brillant » et apte à la négociation. Nommé Inspecteur général de l’administration de l’Education nationale en 2012, il avait produit 10 ans auparavant, à la demande de Ségolène Royal, un rapport sur les troubles du langage qui a permis d’élaborer le plan national pour les jeunes dyslexiques et dysphasiques.
UN CAMOUFLET
Au total, ce serait un camouflet pour le gouvernement local et son Président. Il faudrait probablement voir dans ce geste un message subliminal résultant de l’appréciation générale de l’Elysée et de Matignon sur la qualité de la gouvernance calédonienne depuis deux ans.
Dans cette hypothèse, que pourrait-il se passer de nouveau ?
Les autorités locales pourraient prendre la décision de nommer un local à la fonction de Directeur Général des Enseignements, patron de l’enseignement. Or, dès 2012, date du transfert, la création d’un « service unique » chargé de regrouper les compétences Etat/Nouvelle-Calédonie a été actée, conformément aux conventions prévus par la loi organique.
De surcroît, une brouille n’apporterait que des nuisances à l’enseignement en général, et à la Nouvelle-Calédonie en particulier. La Polynésie a conduit un tel conflit dans un passé récent. Elle s’est rendu compte qu’au delà des incantation identitaires et statutaires, le poids de l’Etat était, dans tous les cas, déterminant. Et qu’il valait mieux entretenir avec lui, des rapports, notamment financiers, francs et cordiaux …