« Rien n’a filtré » de l’entretien entre la Ministre des Outre Mer, Georges Pau-Langevin, et Kenny Rives, le directeur de la branche nickel de Glencore. Les deux interlocuteurs ont indiqué que cet entretien s’inscrivait dans les relations normales entre le trader et le gouvernement. S’il s’agit d’un entretien « normal », pourquoi donc ne pas en donner la teneur ? Commentaires.
TOUTE LA VALEUR DE GLENCORE POURRAIT S’EVAPORER
D’abord, cet entretien n’est pas anodin. Il se situe au moment où les analystes de la banque britannique Investec ont estimé que « presque toute la valeur de Glencore pourrait s’évaporer ».
Le journal Le Monde écrit : « il fut un temps où Ivan Glasenberg (le PDG de Glencore-Ndlr) était un des rois du charbon, du cuivre et du zinc, qui avaient fait de lui un multimilliardaire en dollars, puissant et redouté. Un temps pas si lointain, en 2010, où Glencore (Global Energy Commoditity Resources) affichait déjà un chiffre d’affaires supérieur à celui d’un autre géant suisse plus connu, Nestlé. Plus dure est la chute ».
Ces analyses font suite à l’effondrement, le 28 septembre, des valeurs du groupe aux bourses de Londres et de Hong Kong. « Le groupe joue désormais sa survie » prédisent de nombreux experts.
Glencore a publié un communiqué selon lequel l’entreprise « n’a aucun problème de solvabilité ». Cette prise ee position a redonné quelques couleurs à sa valeur. Mais la multinationale traîne une dette colossale de 3.500 milliards de FCFP, c’est à dire bien plus que ses concurrents Rio Tinto, BHP Billinton ou Anglo American.
Le groupe a lancé une réduction de cette dette à hauteur de 20 milliards de dollars, ce qui l’a conduit a fermer des mines en Zambie et en République Démocratique du Congo, et plus récemment, Falcondo en République Dominicaine.
Quel rebond possible ? Les cours du zinc, du charbon, du cuivre et du nickel demeurent déprimés. La Chine, qui tire vers le haut la croissance mondiale depuis plusieurs années, premier consommateur de matières premières au monde, s’essouffle. Sa réorientation industrielle vers son marché intérieur ne connaît pas le succès escompté en raison d’un pouvoir d’achat qui est demeuré faible pour la majorité de la population.
LE MARCHÉ A-T-IL SURRÉAGI ?
Glencore, société qui fut controversée, n’est pas un inconnu pour le gouvernement français, ainsi que le rappelle le Monde : « Créée en 1994 par le roi du trading Marc Rich sous le nom de Marc Rich + Co, elle a été critiquée – et parfois poursuivie et condamnée – pour ses pratiques fiscales, sociales et environnementales douteuses. Metaleurop, une filiale spécialisée dans les métaux non ferreux qui avait fermé du jour au lendemain son usine de Noyelles-Godault (Pas-de-Calais) en 2003, avait alerté sur ses méthodes. Jacques Chirac, alors président de la République, avait stigmatisé les « méthodes de patrons voyous » de cette entreprise qui avait brutalement licencié 831 salariés et laissé à la charge de la collectivité les énormes coûts de décontamination du site pollué par la dioxine et le plomb ».
Les analystes de Sanford C Berstein, société londonienne de recherche et consulting, sont quant à eux moins pessimistes. Le secteur du négoce, unique par rapport à ses concurrents, de Glencore, selon eux, peut difficilement être valorisé. 25 milliards de dollars ? 100 milliards ? Ils estiment que le marché à surréagi.
ET EN NOUVELLE-CALÉDONIE ?
Question pour la Nouvelle-Calédonie : cette situation inquiétante peut-elle avoir des conséquences pour l’usine KNS ?
Incontestablement, oui. On comprend déjà ainsi pourquoi la réparation du second four a été mise en stand-by. La cession des actifs pourrait être envisagée. Mais en raison des surcoûts considérables de l’usine, leur valeur est actuellement surévaluée. Et puis, le trader a la main sur un domaine minier gigantesque …
Cependant, nul aujourd’hui ne peut prédire l’évolution du marché chinois, et donc celle des matières premières. La SMSP doit prier pour que l’usine demeure opérationnelle parce qu’elle même est sur le fil du rasoir.
Autre aspect : Glencore est-il le trader des exportations de minerai latéritique calédonien vers la Chine ? Si oui, dans le contexte actuel, la multinationale va-t-elle peser … pour les autorisations d’exportation dont les demandes sont actuellement sur le bureau du gouvernement calédonien ?
Une chose est sûre. Pau-Langevin et Rives n’ont pas du échanger que des banalités. Le gouvernement français est désormais informé de la situation difficile de Glencore. L’est-il de ses intentions en Nouvelle-Calédonie ?