UC : LA PAGE CHARLIE PIDJOT EST TOURNÉE : drapeau commun, monnaie locale, un seul referendum

Le Président de l’Union Calédonienne, Daniel Goa, s’exprime dans une intéressante interview réalisée par Les Nouvelles Calédoniennes. On y découvre un responsable autoritaire. Parlant de ceux qui ne sont pas d’accord : « Ces quelques personnalités qui font les « mauvais élèves » devront s’aligner à un moment donné, sinon elles vont se retrouver toutes seules ». Indépendantiste convaincu, ancien adhérent du Parti communiste et formé en partie à Moscou, adepte d’une monnaie ni euro, ni franc, mais locale, il tourne symboliquement la page « Charlie Pidjot » en se prononçant pour un drapeau commun. Déchiffrage.

hienghc3a8neUNE LIGNE POLITIQUE FERME
Assumant le soutien à Philippe Germain « Avec Calédonie Ensemble nous sommes dans la même démarche : 51% dans la SLN », et au delà, sur une « démarche » de décolonisation, le Maire de Hienghène exprime une ligne dure sur l’interprétation de l’Accord de Nouméa. Ce dernier « s’est construit pour éteindre les conflits de légitimité entre Caldoches et Kanak ». Or cette interprétation est plus proche de la tentative de Nainvilles-les-Roches que de l’esprit des Accords originels de Matignon. Dans ces accords, le concept d’indépendance kanak et socialiste réduite donc aux seuls kanak auxquels s’ajoutaient les « victimes de l’Histoire », avait évolué en faveur de quasiment toute la population présente en Nouvelle-Calédonie lors du referendum de 1988. Bien davantage que les seuls « Caldoches et Kanak ».

 Pour autant, il ne veut pas apparaître sectaire et déclare que « le travail », c’est d’aller discuter avec le Rassemblement-FPU et l’UCF pour s’inscrire « dans un avenir commun ».

 S’il apparaît que c’est Roch Wamytan qui conduira la délégation UC au prochain Comité des Signataires, l’orientation est claire et ferme : maintenir a minima les inscriptions sur les listes électorales face « aux petits prétentieux qui débarquent -tous les 5 ans- dans les institutions ».

 UN SEUL REFERENDUM ET UN PROJET DE SOCIÉTÉ PRÊT
Sur l’avenir institutionnel, en revanche, les choses paraissent plus équivoques. Références à Nainvilles-les-Roches, rappel que les kanak sont « le seul peuple colonisé » exprimé par son fameux droit inné et actif à l’indépendance  contenu dans le communiqué de Nainvilles-les-Roches, évocation « du train qui part et il faut être dedans au moment où il part », le décryptage est de mise.

 La décolonisation est la référence essentielle. Même si parce que tous les kanak ne sont pas indépendantistes, le referendum de 2018 ne se solde pas par l’indépendance. « C’est le jeu démocratique, mais nous allons dans le sens de la décolonisation ».

 Alors, un referendum et non trois : affirmation des interviewers, mais réponse à déchiffrer.

 Ce qui est annoncé clairement par le Président de l’UC, en revanche, c’est l’existence d’un projet de société dans une Calédonie évidemment souveraine, projet qui sera non seulement soumis au Congrès extraordinaire du 13 juin, mais discuté « avec nos partenaires qui ne sont pas indépendantistes ».

 Un tel document sera une novation puisque depuis 1975, date de la première revendication d’indépendance, jamais les indépendantistes n’ont exposé de manière claire leur projet.

 UN SEUL EXPORTATEUR DE NICKEL
Le responsable de l’UC indique dans sa bio qu’il est allé par deux fois à Moscou pour une formation en économie politique. Les idées qu’il exprime ne sont pas pour autant des sentences communistes -d’ailleurs l’Union Calédonienne fut créée sur la base de l’anticommunisme par deux associations religieuses kanak, l’UICALO et l’AICLF-, mais confirment les domaines dans lesquels l’UC estime que la puissance publique doit être « propriétaire » : la ressource nickel, la biodiversité, la zone économique maritime en ajoutant qu’il faut se donner les moyens d’instruire les jeunes calédoniens.

 Conséquence à échéance 2019 pour l’UC : ne subsiste qu’un seul exportateur de minerai formé de l’association de la SMSP et du coréen Posco « pour alimenter les usines off-shore ».

 UNE MONNAIE LOCALE
Allant jusqu’au bout de la logique d’indépendance, Daniel Goa exprime une volonté de souveraineté institutionnelle en refusant tout rattachement monétaire à ce qui pourrait apparaître comme une réminiscence de l’époque coloniale.

 Son choix n’est ni le maintien du franc Pacifique, ni l’accession à la monnaie européenne. C’est la création d’un monnaie locale. Laquelle ? La réponse sera forcément contenue dans le projet de société évoqué.

 TOURNER LA PAGE CHARLIE PIDJOT
Exit enfin le soutien unique aux « deux drapeaux » proposés par Pierre Frogier et célébré sans faille par Charlie Pidjot lorsqu’il était Président de l’Union Calédonienne. D’un côté, Calédonie Ensemble n’a toujours pas hissé le drapeau de l’identité kanak dans les communes qui l’avaient refusé, et ne l’a pas descendu dans une commune conquise comme Nouméa. De l’autre, l’Union Calédonienne prend position pour le concept du drapeau commun cher à Philippe Gomes. C’est un nouvel enterrement de feu le leader de la Conception.

 Mais si la position est symbolique, le repositionnement de l’UC ne se limite pas à cette image. Idéologiquement, le parti se rapproche du Palika de Paul Néaoutyne. A l’évidence, l’union au sein du FLNKS reprend de la vigueur. Pas étonnant dans une séquence ultime où certains responsables indépendantistes sont convaincus que les calédoniens opteront pour la pleine souveraineté du pays dès 2018.